Comment prévenir les violences sexuelles sans déprimer

page titre d'une présentation sur les violences sexuelles
Animer un atelier sur les violences sexuelles, c'est aussi faire passer le message que la lutte contre les violences passe par le développement de l'estime de soi, des compétences émotionnelles et relationnelles pour tous et toutes. "Lutter contre" en permanence est usant. Participer à construire la culture d'après-demain est un objectif à la fois humble et ambitieux, pour tenir dans la durée.

J’ai tendance à penser que plus on parle d’un sujet, plus on le renforce. Et plus c’est un sujet qui nous dépasse, plus on ressent l’impuissance. Comment ne pas se décourager quand on parle de violences sexuelles ?

L’Art du Choix met l’accent sur la construction de la culture d’après-demain. Viser le changement culturel dans le temps long pour prendre du recul, prendre soin de la santé mentale de l’équipe et offrir une perspective aux participants : développer les compétences du discernement, de la compassion, de l’intégrité pour créer les conditions d’un monde plus désirable. Plus simplement, mieux communiquer et avoir une meilleure conscience de soi et de l’autre.

En termes techniques, on appelle ça la prévention primaire : travailler le terrain pour éviter que les problèmes apparaissent.

Or, on nous appelle le plus souvent pour faire de la prévention secondaire (on a repéré un problème et on veut éviter qu’il se répande), voire tertiaire (le problème a causé des dégâts et il faut réparer). J’évite d’intervenir en prévention tertiaire, mais je m’adapte aux demandes de prévention secondaire, en apportant la touche « Art du Choix ».

Atelier sur les violences sexuelles

La semaine dernière, j’animais un atelier sur les « violences sexuelles » pour du personnel scolaire, sur 2h.

Nous avons apporté des éléments assez classiques :

  • Définitions juridiques des principaux faits
  • Limites du droit, notamment dans la reconnaissance de la sidération ou des relations d’emprise
  • Chiffres clés pour se rendre compte de l’ampleur du phénomène
  • Mécanisme et cycle de la violence
  • Numéro d’appel
  • Accueillir la parole

Mais aussi des thèmes qui nous sont chers :

Humilité et vigilance

Un exercice pour percevoir notre aversion personnelle, en tant qu’adultes, pour l’embarras dans la relation : on est nombreux à éviter l’embarras de demander, de refuser, de clarifier. C’est le début d’un flou où l’on ne sait plus bien si on veut ou pas, pris entre plusieurs contraintes (ne pas décevoir, ne pas être méchant, être poli, être gentil, être authentique…) et où l’on n’ose pas demander de peur de ce moment gênant « imagine si on me dit non ». Ce jeu social ouvre la porte à la violence.

Le but de cette partie, c’est de ressentir avec délicatesse la violence latente en soi (envers soi ou envers l’autre) pour se connecter au sujet non comme un fléau externe, mais comme un phénomène qui nous traverse en tant qu’humain. Et sentir qu’en soi, on peut déjà réfléchir à amorcer un changement. On peut se réapproprier un pouvoir d’agir. Et comme on le fait sous forme de petit jeu de dialogue, on peut percevoir ce pouvoir d’agir aussi chez l’autre. Pour moi, c’est une graine d’optimisme que l’on sème à ce moment là. Elle pique un peu au début, mais on en voit vite la vertu.

Des points de vigilance quand on anime une session sur le sujet avec les jeunes : délicatesse, choix de participer, temps et préparation à recevoir la parole. Parler des violences peut être violent ou douloureux. C’est d’ailleurs pourquoi certains intervenants ne se sentent pas d’aborder le sujet avec leurs élèves. Ils ne veulent pas « remuer la boue, si on ne peut rien y faire ». Et en même, nombre de témoignages d’adultes expriment combien ils auraient aimé être entendus plus jeunes. Ces moments sont utiles et nécessaires. Et s’y préparer est en effet nécessaire.

Des violences sexuelles à l’estime de soi

Une invitation à travailler les compétences psychosociales tout au long de l’année. Développer l’estime de soi, le choix, la célébration du non, la conscience de soi et de ses émotions, la capacité à lire le langage non verbal (exemple, avec le jeu ok / not ok)… Ici, l’objectif est d’aborder la prévention des violences non frontalement, mais en développant les compétences qui permettent de l’éviter plutôt que d’avoir à s’en protéger. La violence se nourrit en partie de notre incompétence relationnelle collective…

« La violence est l’expression tragique de besoins insatisfaits »

Marshall Rosenberg, créateur de la CNV

L’école repose encore parfois sur un modèle de soumission à l’autorité, associé à la bonne éducation qui invite à ne pas faire de vagues. C’est toujours intéressant de se questionner pour voir comment, en tant qu’intervenant modélisant, j’ouvre des possibilités de choix et d’expression de limites, j’écoute et je pratique le non-jugement, etc. C’est un travail de longue haleine, et certainement difficile dans un cadre professionnel sous contrainte institutionnelle.

Merci, j’ai appris que l’on peut faire de la prévention des violences sans aborder le thème directement des violences quand il peut heurter certains élèves, mais en l’abordant sous l’angle des relations, de l’estime ou de la communication. C’est top.

Une participante

Il ne s’agit pas d’euphémiser ou de contourner un sujet grave. Encore moins de laisser penser que le changement culturel ne repose que sur les individus qui devraient être « plus ci » ou « plus ça » (audacieux, courageux, résilients… cochez les cases qui vous irritent le plus). Le problème est culturel et se traduit dans des comportements individuels.

Mon raisonnement s’appuie plutôt sur deux constats :

  • la résistance au changement : aborder les sujets frontalemnet crée parfois de la résistance et il peut être utile, par souci d’efficacité, de l’aborder par un autre angle.
  • la fatigue, la peur, la réticence des professionnels à aborder ces sujets frontalement avec les élèves, de peur d’être débordés ou de mal faire (voire, de faire mal). Crainte légitime. Proposer une alternative permet de continuer d’inviter à l’action, dans un format plus maniable et qui poursuit le même objectif : le changement.

Quelques visuels de la formation

Quelques ressources utiles sur les violences sexuelles

Centre d’information sur le droit des femmes et des familles

Caroline De Haas (#NousToutes), En finir avec les violences sexistes et sexuelles, Pocket, 2021

Catherine Le Margueresse, Les pièges du consentement, Editions iXe, 2021

https://arretonslesviolences.gouv.fr

#NousToutes

Rapport d’enquête « vécu et ressenti en matière de sécurité» 2022, Victimation – Délinquance et sentiment d’insécurité

L’enquête Cadre de vie et sécurité (CVS)

Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes

Nous faire intervenir

Pour nous faire intervenir, c’est assez simple : contactez nous au magali.rozec @ artduchoix.com

Consultez les pages du site :

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